Cet article termine le cycle Hoffmann et vous fait partager mon expérience de ‘’maquilleuse’’. J’espère que certains parents y retrouveront leur enfant et que les autres y verront le témoignage d’une expérience enrichissante.
La semaine dernière, j’ai eu la chance de maquiller des enfants. Je pensais venir aider et non repartir pleins de souvenirs en tête.
Je dois commencer par parler des enfants. J’étais vraiment heureuse, car je voyais l’émerveillement sur les traits de certains… filles et garçons confondus.
À notre première rencontre, ni eux ni moi ne nous connaissions. Nous commencions à parler un peu. J’ai impressionné un enfant en lui disant que j’avais maquillé les acteurs dans James Bond, je crois que j’ai oublié de lui dire la vérité, mais il avait l’air content. Je demandais ensuite aux filles quelle couleur leur ferait plaisir. Et c’était parti. Je voyais qu’elles étaient toutes ravies d’avoir pour la première fois (ou presque) un maquillage voyant. Je pense que ce qui a le plus plu c’est sans doute le mascara… « comme les grandes ». Certaines en avaient déjà eu bien sûr, mais les plus petites étaient encore plus touchantes par leurs réactions.
Ils ressortaient tout heureux et disaient à leurs amis « c’est super, elle demande qu’elle couleur tu veux ».
Le deuxième jour, on s’était tous un peu repérés. Les enfants revenaient et me demandaient le même camaïeu de couleurs que le jour précédent. Sauf pour les plus grandes qui me laissaient libre choix.
Tous en file indienne, ils attendaient leur tour pendant que d’autres s’habillaient ou se préparaient.
Ce jour-là, nous fûmes un peu en retard. Les mamans et « nounous » m’aidèrent à mettre les paillettes pour finir le maquillage.
L’avant-dernier soir, ceux que je croyais timides le devenaient un peu moins, nous parlions un peu plus. En tout cas, on se souriait. Il y a une chose qui m’a marqué, c’est le sourire indélébile qu’avait une petite fille tout le long de son maquillage. C’était vraiment adorable, elle avait regardé comment je faisais quand ses camarades étaient passés. Cette fillette posa même les paillettes avec son amie sur ses compères les elfes.
Le dernier jour arriva vite et malgré la joie que je me faisais de les retrouver j’étais triste, eux aussi je pense. Deux petits gars me le dirent d’ailleurs. Je leur répondis que tout avait une fin pour un jour recommencer. J’essayais de me convaincre avec eux.
Les garçons m’amusaient. Deux de leur petit groupe me répétaient qu’ils ne voulaient pas de « truc sur les yeux » et je me souviens avoir demandé à deux autres s’il préférait quelque chose de super pour leur dernière représentation ou qu’au contraire s’ils voulaient la simplicité comme leurs copains. Ces deux-là profitèrent de l’occasion pour avoir un maquillage « théâtral »
Je m’amusais aussi de voir leur réaction quand je leur disais mon âge. Parfois même lorsqu’ils savaient que je n’avais que quatorze ans, ils me regardaient comme une adulte. Je me souviens quand, à leur âge, je m’émerveillais devant les filles qui me paraissaient si grandes. Je retrouvais en eux la même chose. Je me rendis compte combien notre point de vue change et évolue avec le temps.
Ce qui m’a plu avec cette expérience ce sont les différents caractères que j’ai pu observer. J’ai vu :
- Celles qui ne voulaient pas se maquiller, mais qui finalement en voulaient plus
- Celles qui se laissaient faire et tester de nouvelles choses
- Celles qui connaissaient et qui voulaient exactement les mêmes couleurs que la fois d’avant.
- Celles qui avaient l’habitude
- Celles qui étaient toutes timides, mais très contentes à la fin et toutes mignonnes.
- Celle qui voulait que ça dure un peu plus longtemps
- Celui qui ne voulait pas venir se faire maquiller, mais qui en fait voulait des couleurs de scène
- Celui qui ne voulait pas grand-chose, qui était adorable et soucieux d’être gentil
- Le clown qui faisait rire les filles et les garçons
- Celui qui me posait plein de questions
Je pense et j’espère avoir fait le tour.
Je retiens aussi la chance que j’ai eue de pouvoir parler et sympathiser avec les solistes. Ça a rendu ce spectacle pour moi encore plus captivant. On écoute et on ressent les choses différemment par la suite, pour les contes d’Hoffman, mais aussi pour les autres opéras. Je pense que je m’intéresserai plus à l’opéra. Je me concentrerai sur des détails qui avant m’indifféraient ou que je n’entendais même pas.
J’ai pu pas mal parler avec certains d’entre eux, avec d’autres, je n’ai échangé que quelques mots et d’autres encore je ne leur ai parlé vraiment qu’à la fin de la dernière représentation. Mais je me rappelle des aux-revoirs. Personne n’avait vraiment envie que cela soit fini, mais la fatigue commençait à être présente pour beaucoup qui ont travaillé énormément. Je pense que nous sommes tous repartis ce soir-là après avoir vu plein de choses, pour certains c’était peu, pour d’autres c’était extraordinaire. Tout le monde pense à sa manière, mais pour moi je ne verrais plus l’opéra et l’art de la même manière.
Clothilde Sautrel
Superbes photos ! Quels souvenirs !